• La Ritaline pour lutter contre l'addiction à la cocaïne ?

    Aude Lecrubier, Fran Lowry

     Auteurs et déclarations09 juillet 2013

     

    Le méthylphénidate, Ritaline, Concerta ou Quasymun, contre l'addiction à la cocaïne ?

    Une étude de preuve de concept suggère que le méthylphénidate prescrit dans le TDAH, pourrait agir sur l'addiction à la cocaïne. Un sevrage par thérapie agoniste plutôt qu'antagoniste. 9 juillet 2013

    New York, Etats-Unis -- Une dose unique de méthylphénidate (Rilatine®, Concerta®, Quasym®), un psychostimulant de type amphétaminique utilisé dans la prise en charge du trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité (TDAH), pourrait agir sur l'addiction à la cocaïne et la sensation de manque chez les personnes dépendantes à la cocaïne [1].

    Dans une petite étude de preuve de concept, des chercheurs de l'école de médecine du Mont Sinaï à New York ont montré qu'une administration courte de méthylphénidate peut « au moins de façon transitoire, remodeler des connections neuronales anormales associées aux caractéristiques physiopathologiques de l'addiction à la cocaïne. »

    Similaire à la cocaïne, le méthylphénidate augmente l'activité de la dopamine et de la noradrénaline dans le cerveau, mais lorsqu'il est administré oralement, le pic de l'effet est atteint moins rapidement.

    « Cela lui donne un pouvoir addictogène plus limité, et en prolongeant l'action de la dopamine, l'agent stimule la signalisation neuronale pour améliorer certaines fonctions cognitives, notamment en termes de traitement de l'information et de l'attention », a expliqué le Pr Rita Z. Goldstein, co-auteur de l'étude et professeur de psychiatrie et de neuroscience, pour l'édition internationale de Medscape.

    L'étude a été publiée dans l'édition en ligne du JAMA Psychiatry du 26 juin.

    Rappelons que fin 2012, une étude randomisée contre placebo a montré un doublement du nombre de patients abstinents à la cocaïne dans un groupe de patients ayant reçu une combinaison de sels d'amphétamine plus topiramate après 3 semaines de traitement versus placebo (33,3% vs 16,7%, respectivement) [2].

    Le méthylphénidate assure un remodelage bénéfique des circuits neuronaux



    Menée par Anna Konova (doctorante, Stony Brook University, New York, Etats-Unis), la nouvelle étude a enrôlé 18 volontaires dépendants à la cocaïne qui ont été randomisés pour recevoir : soit une dose orale unique de méthylphénidate de 20 mg, soit un placebo lors des deux sessions de l'étude.

    A chaque session, les volontaires ont subi une IRM fonctionnelle au repos afin d'examiner les changements de connectivité mésocorticolimbique juste après l'administration de l'agent, avant l'apparition des effets et deux heures plus tard, pendant le pic de l'effet.

    Les chercheurs ont observé que le méthylphénidate diminuait la connectivité entre le striatum ventral et le striatum dorsal, des aires cérébrales fortement associées à la mise en place des habitudes, et notamment à la recherche compulsive de drogue et au manque.

    L'imagerie fonctionnelle a aussi montré que le méthylphénidate augmentait la connectivité entre plusieurs circuits corticolimbiques et corticocorticaux impliqués dans la régulation des émotions et exerçant un contrôle sur les comportements. Des circuits qui sont connus pour être interrompus en cas d'addiction à la cocaïne.

    « Nous avons observé des effets positifs après une dose unique seulement [de méthylphénidate]. Nos images ont montré une amélioration très nette de la communication entre ces régions de contrôle du cerveau, et une réduction de la communication entre les régions cérébrales associées à l'addiction », a commenté le Pr Goldstein.

    « A présent, nous devons rechercher une application thérapeutique en association avec la thérapie cognitive et comportementale ou la remédiation cognitive pour améliorer le contrôle de soi. Une administration une fois par semaine pendant quelques semaines sera peut-être l'option retenue pour évaluer l'impact sur la consommation de cocaïne. Mon laboratoire va s'attaquer à cette nouvelle étape car les résultats en imagerie sont vraiment encourageants », ajoute-t-elle.

    Beaucoup d'essais, beaucoup d'échecs



    Pour le Dr Mark Willenbring (fondateur et directeur du Allina Mental Health, Saint Paul, Etats-Unis), il s'agit d'une très bonne preuve de concept.

    « Jusqu'ici trouver des traitements efficaces sur les addictions, et la cocaïne en particulier, a été très difficile. Le National Institute on Drug Abuse (NIDA) a injecté des millions de dollars dans des essais cliniques pour différents médicaments candidats, en s'appuyant sur des études chez l'animal, et aucun n'est sorti du lot », explique-t-il.

    Il ajoute, « mais, je pense que la stratégie de la thérapie agoniste, contrairement à la thérapie antagoniste, devrait mener à de meilleurs résultats. Il existe déjà des exemples comme ceux de la buprénorphine (Subutex®) ou de la méthadone dans l'addiction aux opioïdes, et la varénicline (Champix®) dans le sevrage tabagique. La thérapie agoniste devrait apporter des bénéfices et cette étude suggère qu'il pourrait y avoir de réels effets sur des aires du cerveau qui sont impliquées dans les comportements addictifs, comme l'a montré l'IRM fonctionnelle. »

    Ce sujet a fait l'objet d'une publication dans Medscape.com


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