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    Les personnes autistes peuvent avoir de l’empathie

     

     

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    Les personnes autistes peuvent avoir de l’empathie © istockphoto.com/CheryCasey

     

    Contrairement à ce que l’on croyait jusqu’ici, les autistes sont capables de percevoir la douleur sur le visage d’une personne qui souffre, comme viennent de le montrer des chercheurs lausannois.

     

     

     

    Les personnes autistes paraissent isolées dans leur monde intérieur. Affectées, dès leur plus jeune âge, par un sévère trouble du développement, elles ont en effet des difficultés à communiquer, ont du mal à établir des liens sociaux et présentent des troubles du comportement. Parce qu’elles ne parviennent pas à percevoir les émotions de leurs semblables et donc à ressentir pour eux de l’empathie? C’est ce que l’on pensait jusqu’ici, mais cette explication est aujourd’hui démentie – du moins en ce qui concerne la douleur. Les autistes sont tout à fait capables de «lire» la souffrance sur le visage d’une personne qui a mal et de ressentir pour elle de l’empathie. C’est ce que viennent de montrer des chercheurs de l’EPFL et de l’Université de Harvard (Etats-Unis), en collaboration avec leurs collègues des universités de Brest (France) et de Gothenburg (Suède).

    Différentes formes d’empathie

    Les scientifiques ont fait appel à une quarantaine d’adolescents et de jeunes adultes autistes, ainsi qu’à un nombre équivalent de Lausannois recrutés dans la population générale, à titre de groupe contrôle. A tous, ils ont présenté de brefs clips montrant le visage de patients souffrant d’une épaule. Ceux-ci avaient des grimaces de douleur lorsqu’ils bougeaient leur articulation malade, mais ils restaient neutres quand ils agitaient l’autre bras.

    Les volontaires des deux groupes devaient ensuite remplir des questionnaires destinés à «évaluer leur niveau d’empathie sociale, cognitive et émotionnelle», explique la principale auteure de cette étude, Nouchine Hadjikhani, médecin et spécialiste des neurosciences, qui travaillait alors au Brain Mind Institut de l’EPFL.

    Les chercheurs n’ont pratiquement pas constaté de différence entre les autistes et le groupe témoin pour ce qui est de l’empathie dite «émotionnelle», celle qui fait que nous sommes bouleversés par la souffrance d’autrui. Toutefois, comparées aux autres, les personnes autistes manifestaient beaucoup moins d’empathie «cognitive» (celle qui nous incite à nous mettre à la place de l’autre) et d’empathie «sociale» (celle qui nous permet de savoir «ce qui se fait», ou non, quand on est en société).

    Comme les médecins

    Cette conclusion a été confirmée par l’observation du cerveau des volontaires à l’aide de l’imagerie cérébrale. «Les résultats ne correspondaient pas du tout à ce que l’on attendait, souligne Nouchine Hadjikhani. Nous avons en effet constaté que, statistiquement, les images n’étaient pas très différentes» entre les deux groupes. En d’autres termes, en voyant un visage exprimant de la souffrance, les autistes activent, comme tout un chacun, la «matrice de la douleur». Il s’agit de ces zones cérébrales qui «s’allument» non seulement quand nous avons mal nous-mêmes, mais aussi lorsque nous voyons quelqu’un d’autre souffrir. En revanche, les personnes autistes activaient davantage les régions du cerveau liées au contrôle des émotions.

    Cela indique que «les autistes ressentent eux aussi la douleur des autres, mais ils n’arrivent pas à comprendre cette émotion, explique la chercheuse. En outre, ils sont hypersensibles et ne parviennent pas à réguler leurs propres réactions émotives. Donc, ils se protègent».

    Etonnement, le cerveau des médecins réagit de la même manière, comme l’avait révélé une tout autre étude. Ces professionnels de la santé, qui côtoient quotidiennement la douleur de leurs patients, utilisent la même stratégie cérébrale pour contrôler leurs émotions. Et pour se préserver.

    L’étude lausannoise jette donc un nouvel éclairage sur l’autisme. Les personnes atteintes de ce trouble ne sont pas insensibles à la douleur de leur entourage, bien au contraire. Mais elles se blindent pour se prémunir d’une émotion qui, sinon, viendrait les submerger. C’est sans doute pour cette raison qu’elles ne se comportent pas comme on le fait généralement lorsqu’on est en présence de quelqu’un qui souffre.


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  • Percer les mystères du regard des autistes

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    Percer les mystères du regard des autistes © Basilio Noris, LASA / EPFL
    Un projet de recherche conjoint entre le CHUV et l’EPFL a permis d’avancer dans la compréhension de l’autisme, grâce à un appareil capable de reproduire la perception de l’environnement des enfants qui souffrent de cette maladie.

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    Un article CHUV
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    Déceler le plus tôt possible des syndromes autistiques chez l’enfant en bas âge, afin de permettre une meilleure prise en charge: voici le projet auquel s’attellent depuis plusieurs années de nombreuses équipes de recherche, dont celle formée par des collaborateurs du CHUV et de l’EPFL.

    Mais pourquoi s’intéresser particulièrement au regard? «On a remarqué très tôt que les enfants avec autisme avaient ce que l’on appelle une exploration visuelle particulière, explique la Dresse Mandy Barker, du Service universitaire de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent du CHUV (Département de psychiatrie). Par exemple, alors que les enfants normaux chercheront toujours le contact avec le visage et les yeux de leurs parents ou de leur interlocuteur, les enfants avec autisme auront plutôt tendance à éviter le regard de la personne en face d’eux.»

    «C’est le résultat de cinq ans et demi de travail, à coups de petites améliorations»

    Cette caractéristique s’intègre dans les critères définis par Kanner et Asperger dans les années 1940 qui permettent de diagnostiquer un autisme: difficultés dans les interactions sociales et dans le domaine de la communication, tout en montrant un intérêt dans les activités répétitives. «Evidemment, la réalité est beaucoup plus complexe, admet la Dresse Mandy Barker. C’est pour cela que l’on parle plutôt aujourd’hui d’un trouble du spectre autistique assez hétérogène, dans lequel on retrouve des enfants avec un autisme léger, parfois difficile à déceler, ou beaucoup plus sévère.»

    On savait donc que les autistes n’observaient pas le monde qui les entoure comme les autres enfants. Mais on ignorait encore ce qui pouvait bien attirer leur regard. Pour le découvrir, de nombreuses équipes internationales ont développé plusieurs méthodes depuis une dizaine d’années. L’une des plus connues est la technique dite de «l’eye tracking», qui consiste à projeter des images ou une vidéo devant l’enfant, et retracer le parcours de ses yeux à l’aide de lasers: «on a ainsi pu démontrer que l’enfant autiste avait tendance à ne pas s’intéresser aux expressions des visages projetés, mais plutôt à des détails, comme un objet brillant», commente la Dresse Mandy Barker.

    Percer les mystères du regard des autistes

    L’appareil enregistre ce que voit l’enfant ainsi que la position de ses yeux. On peut ensuite définir ce sur quoi il porte son attention (zone nette dans les cercles rouges). Alors que les enfants normaux chercheront le contact direct avec leur interlocuteur (images du haut), les enfants souffrant d’autisme auront plutôt tendance à fuir le regard (images du bas).

    © Basilio Noris, LASA / EPFL

    Manquait encore la possibilité d’étudier le regard des enfants dans leur environnement. C’est justement dans ce but que l’EPFL a développé la Wearcam: un petit appareil très léger constitué de deux caméras, et pouvant être facilement fixé sur le front, capable d’enregistrer ce que voit l’enfant. Mais le petit «plus», c’est un miroir, installé sous les caméras, qui reflète la position des yeux: grâce à lui, il est possible de déterminer précisément ce que l’enfant regarde.

    «C’est le résultat de cinq ans et demi de travail, à coups de petites améliorations, résume Jean-Baptiste Keller, ingénieur en microtechnique à l’EPFL, ayant participé au projet. Il s’agissait également pour nous de réaliser un appareil suffisamment simple à utiliser pour les cliniciens, et que les enfants puissent tolérer facilement.» Environ 60 enfants âgés entre 3 et 10 ans ont participé à l’étude menée de concert entre l’EPFL, le CHUV et les Hôpitaux universitaires genevois (HUG).

    A chaque fois, le déroulement des séances était identique: durant une quinzaine de minutes, un thérapeute se tenait devant l’enfant afin de le faire participer à certaines activités ludiques, comme faire des bulles de savon ou de la pâte à modeler. Les données étaient ensuite traitées informatiquement: on mesure en particulier la fréquence, la durée et l’orientation du regard que l’enfant porte aux visages.

    Le médecin reste indispensable

    «L’objectif est, depuis le départ, d’aider le clinicien, pour qui la décision de savoir si un enfant avec autisme ou non peut s’avérer complexe en se basant uniquement sur son observation ainsi que des critères théoriques que l’enfant ne remplit jamais totalement», commente Aude Billard, professeure associée d’algorithmes et systèmes adaptatifs à l’EPFL et partenaire du projet Wearcam. Pour toute l’équipe ayant participé au projet, il ne faut bien sûr pas s’attendre à ce que les «machines» seules puissent un jour établir un diagnostic concernant l’autisme: «De plus, la petite superficie de la Suisse ne nous permet pas de réaliser des statistiques aussi importantes que celles obtenues aux Etats-Unis par exemple, où une ville comme Boston compte déjà plus d’habitants que notre pays, regrette la prof. Aude Billard. Pour arriver à des résultats comparables, il faudrait que tous les pays d’Europe mettent en commun leurs données.»

    Néanmoins, la réalisation de leur projet permet déjà d’affiner le diagnostic chez les enfants en bas âge. «Détecter des traits autistiques chez les moins de 12 mois et poser un diagnostic formel avant l’âge de 24 mois est difficile, explique la Dresse Mandy Barker. Néanmoins, nous recevons de plus en plus d’enfants âgés de moins de 2 ans suspectés d’autisme par leur pédiatre ou leurs parents; et les premiers résultats de nos recherches nous laissent espérer que la Wearcam puisse, dans un proche avenir, nous aider pour lever ou confirmer leur soupçon.»

    Prise en charge des enfants autistes

    Le Service universitaire de pédopsychiatrie du CHUV propose une consultation ambulatoire spécialisée (CSD-P) pour les enfants de 0 à 18 ans présentant des troubles du spectre autistique. Elle propose une évaluation spécifique de ces difficultés, une réflexion diagnostique et une orientation thérapeutique. La CSD-P offre également un suivi à long terme et un soutien thérapeutique aux familles afin de faciliter leur vie au quotidien.

    Pour plus d’informations

    Tél. 021 314 37 80 – E-mail: supea.liaisonchuv@chuv.ch


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  • Signaux d'alertes

     

    Les signes précoces sont à considérer comme des signaux d’alertes ou symptômes précurseurs présents avant l’âge de deux ans et devant déboucher sur un avis spécialisé rapide.

    Ils ont été souvent décrits depuis trente ans et  étudiés par les films familiaux. 

     

    Entre 0 et 1 an

    Entre 0 et 1 an, il faut prêter attention à une absence de sourire social (en réponse au sourire parental), un défaut d’attitude anticipatrice (l’enfant ne tend pas les bras quand son parent s’approche), une fuite du regard, une impression de surdité (défaut de réaction aux sons ou à l’appel du prénom), un défaut de vocalisations ou une absence d’angoisse de l’étranger (peur face aux non familiers qui apparaît vers 9 mois).

     

    Entre 1 et 2 ans

    Entre 1 et 2 ans, l’absence de jeux de faire semblant, d’attention conjointe (suivre le regard de l’adulte pour regarder la même chose) et de pointage déclaratif (montrer du doigt ce qui intéresse) sont considérés comme de sérieux signes prédictifs. Il n’est pas rare d’observer aussi des attitudes contemplatives (de lumière, d’objets circulaires ) et des mouvements répétitifs (balancements, pianotage des doigts).

     

    Des outils de dépistage comme le CHAT peuvent être utilisés pour repérer ces signes précoces et ainsi réaliser les premières observations et investigations puis proposer les premières interventions précoces. 

    Mais le premier signe d’alerte reste la préoccupation des parents face à l’absence de réactivité de leur enfant.


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  • Les particularités de fonctionnement

     

    Il faut souligner à quel point la connaissance de ce fonctionnement peut nous aider à comprendre ces troubles, à définir des programmes d’aides et à adapter leur environnement.
    Ces personnes développent souvent une hypersensibilité sensorielle ayant pour conséquence une perception d’odeur, de sons ou de certains détails qui les empêchent de se concentrer ou de rester en relation avec l’autre.

    Les processus intellectuels sont marqués par une forte tendance à concrétiser ou à avoir recours aux perceptions visuelles ou tactiles. Ainsi les codes sociaux, les règles implicites ne vont pas de soi, ce qui engendre de l’incompréhension et de l’angoisse. La compréhension de concepts abstraits, du double sens ou de l’humour peut en être gênée. Ces difficultés seraient sous-tendues par une faible cohérence centrale et/ou un surfonctionnement perceptif et /ou un défaut de théorie de l’esprit.
     

    Défaut de théorie de l’esprit

    La théorie de l’esprit est définie comme la capacité d’attribuer un état mental (par exemple : intentions, croyances, désirs) aux autres et à soi-même. La capacité d’envisager ce que les autres croient être le cas dans une situation donnée nous permet de prédire ce qu’ils vont faire. En 1985, Baron-Cohen et al. (199) ont les premiers mis en évidence un défaut de théorie de l’esprit chez des enfants avec autisme de haut niveau en utilisant un modèle adapté aux très jeunes enfants (test de Sally-Anne). Dans cette étude, les enfants avec autisme de haut niveau (n = 20) de meilleur niveau verbal et cognitif que des enfants témoins au développement typique plus jeunes que les précédents (n = 27), et que des enfants avec trisomie (n = 14), ont eu des difficultés pour réussir le test que n’ont pas eu les enfants des deux autres groupes (20 % de réussite au test pour le groupe avec autisme versus 85 % pour le groupe au développement typique et 86 % pour le groupe avec trisomie ; p <0,001) (199).
    Des études ont mis en évidence une association entre les capacités de théorie de l’esprit et le niveau de développement verbal et cognitif (200). Le défaut de théorie de l’esprit n’est pas spécifique à l’autisme (198).

    sources : HAS - Autisme et autres troubles envahissants du développement - État des connaissances hors mécanismes physiopathologiques, psychopathologiques et recherche fondamentale - 2010 - p.62)

     

    Les émotions ne sont pas toujours perçues ou exprimées. Parfois, elles peuvent être difficilement régulées. D’où une apparente indifférence ou au contraire une réaction excessive et inappropriée.

    Leurs particularités cognitives et leurs motivations pour certains domaines permettent parfois de développer des compétences élevées (musique, informatique,calcul, dessin…)
    Des particularités sensorimotrices sont décrites par de nombreux cliniciens (par exemple manque de tonus, marche robotisée ou sautillante,  regard en coin…)
     

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  • la connaissance de trois notions : l’autisme  infantile, les troubles envahissants du développement (TED), les troubles du spectre autistique (TSA)

     

    Comprendre ce que l’on appelle communément l’autisme repose sur la connaissance de trois notions : l’autisme  infantile, les troubles envahissants du développement (TED), les troubles du spectre autistique (TSA)

    Le terme « autisme » était crée par E. BLEULER à partir du Grec « autos »pour désigner le retrait sur soi-même du patient schizophrène.
    Il est utilisé par L. KANNER en 1943 pour décrire « un trouble inné de la communication et du contact affectif chez certains enfants.

    Des multiples descriptions et modèles de compréhension de l’autisme se sont par la suite succédés du fait de la diversité des formes cliniques, des recherches et des contextes idéologiques.
    Ainsi plusieurs symptômes, critères ou dénominations sont retrouvés dans les principales Classifications Nosographiques (Classification Française, Américaine et Mondiale).

    Aujourd’hui, toutes ces formes cliniques sont regroupées dans un vaste ensemble appelé : Troubles Envahissants du Développement.
    La classification internationale des maladies (CIM-10) est la classification de référence. 

    Recommandations pour la pratique professionnelle du diagnostic de l'autisme (Haute Autorité de Santé - 2005)
    Autisme et autres TED diagnostic et évaluation chez l’adulte
    (Haute Autorité de Santé - 2011)


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